Mourir et ressusciter
Si l'on se réfère à une ancienne philosophie chinoise, on parle du Yin et du Yang. Le Yin est représenté par la couleur noire et symbolise l'obscurité, le froid, la réceptivité. Le Yang est blanc et représente la lumière, la chaleur, l'action. Il ne s'agit pas de dire que l'un est bon ou mauvais, mais qu'ils sont complémentaires et vont de pair. Il existe une dynamique entre les deux. C'est pourquoi le noir du Yin contient une partie blanche du Yang et vice versa.
Les échecs sont-ils mauvais dans notre vie ? Oui, surtout pour notre ego.
Si l'on considère la croix, était-elle un échec ?
Très certainement. Elle a signifié la fin horrible de la vie de Jésus. Et elle a signifié la fin de l'espoir des disciples. C'est pourquoi deux disciples retournent déçus à leur domicile d'Emmaüs et que Marie-Madeleine pleure devant le tombeau de Jésus. Car tout ce qui avait été construit au cours des dernières années a pris fin.
Y a-t-il une autre façon de voir la croix ?
Pour Dieu, oui, car après la mort sur la croix, il a ressuscité Jésus. Ainsi, la croix n'est pas un point final, mais un passage. C'était d'abord le cas pour Jésus, mais ensuite aussi pour les disciples. Il a fallu trois jours à Jésus pour le découvrir, mais beaucoup plus de temps aux disciples. Car même lorsque Jésus leur est apparu pour leur montrer qu'il était vivant, les disciples se sont enfermés. Ce n'est qu'après la descente du Saint-Esprit qu'ils ont pu vraiment surmonter leur peur et quitter leur refuge.
Le peintre néerlandais Vincent van Gogh a dit : « Le succès est parfois le résultat d'une série d'échecs. » En d'autres termes, sans ces échecs, vous n'auriez pas atteint ce succès.
Ce genre de déclarations ne peut être fait qu'à la fin du tunnel sombre, lorsque l'on a réussi. Mais que faire lorsque l'on est encore au milieu des ténèbres ? Notre seul soutien est alors notre lien avec le Christ sur la croix. Serrer ses pieds, tandis que Jésus s'écriait : « Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? ».
Là, sur la croix, Jésus se sentait abandonné, incompris, humilié et effrayé ; les mêmes émotions que nous pouvons ressentir. Il était pleinement humain comme nous et c'est pourquoi il peut comprendre nos sentiments négatifs. Il veut que nous participions aussi à sa résurrection, mais c'est un chemin qui passe toujours par la croix.
Tout comme le Yin et le Yang, mourir et ressusciter vont de pair. Et ce n'est pas seulement un processus à la fin de notre vie, mais un processus quotidien. Chaque jour, nous pouvons mourir et ressusciter.
C'est ainsi que Jésus a sauvé le monde.
Eugène
Attitudes d'un chrétien
lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en moi. (Lc 1, 44)
La joie vient donc de la voix de Jésus qui résonne dans la voix de Marie. Il devrait en être de même pour nous, baptisés : que la voix de Jésus résonne à travers notre voix, afin que les personnes qui nous entourent puissent éprouver de la joie.Dans l'Évangile, lorsque les deux femmes enceintes ont éprouvé cette joie et en sont remplies, elles parlent de Dieu et de ses actions. Elles voient Dieu à l'œuvre partout : en elles-mêmes, dans l'autre et dans le monde. Dans cette mesure, le monde devient transparent et donne une vision du ciel.
Marie et Élisabeth voient Dieu agir dans le monde et croient qu'il continuera à agir. Il tiendra les promesses qu'il a faites au fil des siècles. Fortes de cette confiance, elles peuvent dire « oui » à ce que Dieu leur demande. Elles se soutiennent mutuellement dans cette démarche. Elles confirment leur foi l'une auprès de l'autre.
Le texte sur la rencontre entre Marie et Élisabeth met en évidence différentes attitudes d'un chrétien.
- Tout d'abord, la joie. Nous pouvons traverser la vie comme un vieux grincheux, comme quelqu'un qui commente tout et voit des problèmes partout. Mais nous pouvons aussi traverser la vie comme quelqu'un qui est rempli de la joie de Dieu et qui répand cette joie partout. Nous chantons cette joie.
- La cause de cette joie est que nous voyons l'action visible de Dieu et que nous le remercions pour cela. Il est la source de tout le salut dans le monde, dans notre vie. Et il peut opérer le salut en nous.
- De plus, notre tâche consiste à confirmer la foi chez l'autre. À aider l'autre à découvrir où et comment Dieu agit. Que Dieu n'a jamais abandonné le monde.
Ainsi, nous pouvons nous joindre dans notre vie à ces chants de louange d'Élisabeth et de Marie.
Eugène
Choisi, aimé et appelé à la compassion
puisque vous avez été choisis par Dieu,
que vous êtes sanctifiés, aimés par lui,
revêtez-vous de tendresse et de compassion,
de bonté, d’humilité, de douceur et de patience.
On pourrait appliquer cette phrase à la vie d’Eymard.
puisque vous avez été choisis par Dieu,
Eymard avait été choisi par Dieu pour une œuvre eucharistique. À Fourvière, il avait reçu une grâce. Mais la manière dont cette grâce devait se concrétiser n'était pas claire et le chemin pour y parvenir était long. Devait-il le faire en tant que prêtre diocésain ? En tant que Mariste ? Il restait encore beaucoup de choses à éclaircir.
que vous êtes sanctifiés, aimés par lui,
Dieu a commencé une œuvre de sanctification chez le père Eymard, qui s'est manifestée le plus clairement lors de la Grande Retraite de Rome. Durant cette retraite le père Eymard va alors en profondeur, de sorte que seul Dieu demeure. Il ne s'agit plus des œuvres, mais de Dieu lui-même.
revêtez-vous de tendresse et de compassion,
de bonté, d’humilité, de douceur et de patience.
Le père Eymard a pu en faire l'expérience notamment dans sa relation avec son premier disciple : le père DeCuers. Celui-ci s'est avéré avoir une vision totalement différente de l'Eucharistie, si bien qu'il a fini par partir et vivre seul. Le père Eymard a dû non seulement apprendre à surmonter cette épreuve, mais aussi à continuer à traiter DeCuers avec compassion.
Ce texte s'applique à la vie d'Eymard, mais on peut l'appliquer à la vie de chaque être humain : choisi par Dieu, aimé par Dieu et appelé à la compassion.
Eugène
Le veau d'or
L'absence de Moïse représente le vide dans lequel se trouve le peuple. Ils manquent non seulement de leadership, mais aussi de direction et de confiance. Comment aller de l'avant ? Ils aspirent à une certitude, à un symbole physique d'une force qui les guide.
C'est ainsi qu'ils créent le veau d'or comme Dieu de remplacement : un veau d'or peut sembler fantastique, mais cette beauté est vide, car cette image ne peut pas guider le peuple. Il a l'air saint, mais ce n'est qu'une façade brillante.
La réaction de Dieu à cet événement est féroce et parle de destruction et de punition. Cette réaction appelle le peuple à un moment de prise de conscience. Quelle est la valeur réelle de la vie ?
Moïse plaide pour le peuple, il y a réconciliation et une nouvelle alliance. Le peuple revient à ses origines : la délivrance de l'Égypte par le Dieu de ses ancêtres.
Dans cette mesure, l'histoire du veau d'or n'est pas une fin, mais un nouveau départ dans la traversée du désert.
La prière d'Abraham pour Sodome et Gomorrhe
Le premier élément du récit est l'attitude d'humilité d'Abraham lorsqu'il dit :
moi qui suis poussière et cendre. (Gen. 18,27)
Il reconnaît sa petitesse devant Dieu, malgré sa relation spéciale avec lui. En d'autres termes, le Père Eymard dit la même chose lorsqu'il cite Paul :Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. (Gal. 2,20)
Eymard parle de son union profonde avec le Christ et du fait que sa vie est désormais guidée par le Christ qui habite en lui.* Une attitude d'humilité aide le chrétien à reconnaître ses propres limites et à réaliser que la vie chrétienne n'est pas une question de gloire personnelle ou de pouvoir, mais de service. L'humilité ouvre le cœur à la communauté, à l'écoute des autres et à l'accueil de la grâce.
Le deuxième élément est de voir la misère : Dieu parle de la misère à Sodome et Gomorrhe et Abraham prend conscience de la misère présente.
Nous lisons tous les journaux et suivons les informations à la télévision, et c'est ainsi que nous entendons parler chaque jour des conditions misérables qui règnent dans le monde. Le danger de ce déluge de misère est que nous nous y fermons et devenons indifférents. Lors de son premier voyage à Lampedusa en 2013, le pape François a déclaré :
Nous nous sommes habitués à la souffrance des autres. Elle ne nous touche plus, elle ne nous concerne plus.
Abraham montre qu'il n'est pas indifférent à la souffrance.* Et c'est l'élément qui concerne la vie d'un chrétien: voir la souffrance dans le monde.
Le troisième élément est qu'Abraham prie et plaide pour les habitants des deux villes. Il montre ainsi sa compassion. Il prie non seulement pour son cousin Lot qui vit là, mais aussi pour tous les habitants des villes qu'il ne connaît pas. Sa prière est l'expression de l'amour universel, du désir que même le pécheur soit sauvé.
* Pour les chrétiens, la compassion est le cœur de la vie chrétienne. C'est la capacité d'être touché par la souffrance des autres et d'y répondre concrètement. On se porte mutuellement dans la vulnérabilité, on prend soin des malades, des personnes âgées, des personnes en recherche. Et que l'on s'engage en faveur de la paix, de la réconciliation, de la réparation des relations brisées.
Un autre élément est qu'Abraham invoque la justice de Dieu. Il pose une question fondamentale :
Celui qui juge toute la terre n’agirait-il pas selon le droit ? (Gen. 18,25).
Il part du principe que Dieu est juste et que cette justice doit aussi être visible dans ses actions.* Pour les chrétiens, la justice est une valeur fondamentale. Cela signifie travailler pour la justice au sein de la communauté et au-delà. Cela signifie défendre les pauvres, les exclus, les victimes de l'injustice. La justice n'est pas seulement une mission sociale, mais aussi une vocation spirituelle.